Découverte

Jésus est juif. Il est intéressant de replacer la prière du Notre Père qu’il nous a laissée dans son contexte historique juif, la tradition d’Israël – où Jésus ne veut pas rompre avec la Torah « Je ne suis pas venu abolir mais accomplir… – et dans sa langue d’origine l’hébreu ou l’araméen – qui révèle des “jeux de mots” tout à fait lumineux et intéressants sur le fond.

 

Avinou shébashamayim (en hébreu) ou avona débishmaïa (en araméen), voilà l’introduction de la prière de Jésus et que l’on traduit par « Notre Père qui es aux cieux ». Jésus ne mentionne jamais le Tétragramme – YHWH – le nom Elohim ou d’autres noms divins mentionnés dans la Bible. Il se relie au « Père » et à « notre Père ».

Qui dit paternité de Dieu, implique fraternité des enfants de Dieu : Notre Père, donne-nous, pardonne-nous, délivre- nous , quiconque récite cette prière se sent de facto en lien avec les autres récitants.

 

Les cieux représentent l’harmonie des contraires

Notre Père qui es aux cieux : en hébreu « cieux » se dit shamaïm dont l’étymologie rassemble à la fois les notions d’eau et de feu et représente donc l’harmonie des contraires. En inaugurant ainsi sa prière, Jésus nous rappelle qu’au-dessus de nous se trouve non pas une voûte céleste anonyme, mais un lieu d’amour à imiter, un lieu de paix nous invitant à la construire ici-bas. Jésus propose la révolution de l’amour, un modèle communautaire pour faire advenir le Royaume de Dieu sur terre.

 

Le “règne” met l’accent sur la finalité

Que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne : le nom est donné à la naissance et renvoie à l’origine, le règne à venir met l’accent sur la finalité ainsi c’est toute l’Histoire de l’humanité qui est balayée.

 

Le pain de ce jour, un appel à la confiance

Après le saint Nom et le Royaume du ciel, après l’appel à la réalisation de la volonté divine, Jésus nous rappelle la réalité terrestre et la nécessité de manger, de se rassasier. Par la prière « Donne-nous notre pain de ce jour », Jésus nous demande de nous contenter de ce qui nous est donné (cf Adam et Eve, l’épisode de la manne dans le désert), de vivre dans la confiance et la prière : la foi s’exprime d’abord pour l’ici et le maintenant. Il exclut bien sûr de manger le pain de l’autre.

 

Et c’est parce que nous dépassons les limites fixées que nous entrons en conflit avec Dieu et nos frères d’où la demande suivante immédiate de pardon, et là c’est le seul moment où nous sommes mis en position d’acteur « comme nous pardonnons aussi… »

 

Il y aurait encore beaucoup d’autres choses à dire, Philippe Haddad a d’ailleurs mis par écrit le fruit de tout ce travail de réflexion dans un livre que l’on peut se procurer sur internet.

 

Florence Boulangé

L’ouvrage de Philippe Haddad, Une lecture juive de la prière de Jésus, est publié en auto-édition et disponible ici