Qui ne connaît pas l’ancien hôpital St-Julien de Laval ? A la veille de sa “renaissance”, une exposition vous attend jusqu’au 27 avril à la maison Cardinal-Billé, sur le fondateur des soeurs Hospitalières de St-Joseph qui ont soigné là des générations de Mayennais : Jérome  Le Royer de la Dauversière.

 

C’est un concours de circonstances qui nous vaut cette exposition, ou plutôt une rencontre. Celle de soeur Marie-Thérèse Rivière, ancienne infirmière de l’hôpital St-Julien, et laïque consacrée, des soeurs Hospitalières de St-Joseph. L’autre circonstance, c’est aussi le beau projet qui se prépare sur le site de l’Hôpital St-Julien, un lieu de vie intergénérationnel composé d’un foyer pour seniors, un centre de santé, un internat de jeunes, un patronage, un bar associatif… Encore un peu de patience !

Les soeurs hospitalières à St-Julien depuis 1853

A l’angle de la rue Sainte-Anne et du Quai Paul-Boudet l’ancien hôpital Saint-Julien est l’un des plus grands édifices de la Ville de Laval. Fondé au XIIe siècle et primitivement en face du château, l’actuelle construction date du XVIIe siècle. Dès 1680, des religieuses hospitalières de St-Joseph, originaires de La Flèche, sont appelées à prendre en charge les locaux. Leur ordre vient de naître en Sarthe, du coeur d’un homme exceptionnel inspiré par l’Esprit Saint : Jérôme Le Royer de la Dauversière. A cette même date les premiers malades sont accueillis au sein de l’hôpital. En 1714, l’hôpital a été augmenté d’un autre bâtiment dit des Incurables. On l ‘appelait alors l’hôpital St-Joseph. Ce n’est qu’au milieu du XIXe siècle qu’il repris son nom d’origine : St-Julien. Les soeurs ont quitté le service des malades au début des années 80. L’hôpital St-Julien est alors devenu une maison de retraite jusqu’en 2014.

capture d’écran Google Maps

Mais qui était Jérôme Le Royer de la Dauversière ?

Jérôme, l’aîné de trois enfants, naît à La Flèche le 18 mars 1597. Il est baptisé le même jour à l’église paroissiale de Saint-Thomas. Son père exerce l’importante charge d’intendant des Chanoines de la collégiale Saint-Martin de Tours. Le jeune Jérôme s’y imprègne d’un esprit de charité et de zèle apostolique.

En 1608, la famille revient à La Flèche et Jérôme entre au célèbre collège Henri IV : il y reçoit une formation humaine, scientifique et spirituelle de grande qualité. En 1618, il succède à son père dans la charge d’inspecteur des impôts. Le vaste territoire qu’il doit parcourir le met en contact avec bien des réalités humaines. En même temps, il poursuit ses divers et nombreux autres engagements au service de la ville et dans des groupes de prière et de charité.

En 1621, il épouse Jeanne de Baugé, d’origine mancelle. Ils auront cinq enfants dont quatre se consacreront au Seigneur dans la vie sacerdotale ou religieuse.

 

Un appel aux service des pauvres

Le 2 février 1630, lors d’un pèlerinage en famille, dans la chapelle fléchoise de Notre-Dame du Chef-du-Pont, Jérôme se sent appelé à fonder une congrégation religieuse féminine pour le service des pauvres et des malades à l’hôpital de La Flèche. Avec l’assentiment de son confesseur et l’aide financière de son ami, le Baron de Fancamp, il voit à la construction d’un nouvel Hôtel-Dieu. Marie de la Ferre, pieuse et charitable fléchoise, ayant reçu le même appel à servir Dieu dans les pauvres et les malades, devient la co-fondatrice et la supérieure de la nouvelle famille religieuse placée sous le vocable de la Sainte Famille et particulièrement de saint Joseph.

 

Il fonde en France et aussi au Canada

Cinq ans plus tard, à Notre-Dame de Paris, Jérôme est à nouveau investi d’une mission encore plus difficile à réaliser : fonder une colonie pour l’évangélisation des Amérindiens en Nouvelle-France, dans l’Île de Montréal ! Elle était alors la propriété d’un gentilhomme français, Monsieur de Lauzon. Toujours avec l’aide de Pierre de Fancamp, Jérôme acquiert cette île. Il fonde « la société de Notre-Dame de Montréal », recrute des colons, envoie le matériel nécessaire à leur installation.

Jérôme cumule toutes ces activités avec celles liées à sa famille, à sa vie professionnelle et à ses autres engagements mais il doit encore lutter pour permettre le départ des trois premières Sœurs Hospitalières destinées au service de l’Hôtel-Dieu de Montréal. En juin 1659, il les accompagne à La Rochelle et rentre, épuisé, à La Flèche où il meurt le 6 novembre de la même année.

L’extraordinaire histoire de ce laïc, père de famille, engagé dans la société, le service des pauvres et l’évangélisation des « périphéries » proches et lointaines n’a-t-elle pas encore quelque chose à nous dire aujourd’hui ?

Statue de Jérôme Le Royer de la Dauversière à la Flèche
crédit photo : la ville de la Flèche

Ernée et les Hospitalières, encore une très belle et longue histoire

Vers le milieu du XVIIe siècle, à la demande du curé d’Ernée, sœur Marguerite Lair, religieuse bernardine du couvent de Mousse, de l’Ordre de Clairveaux, vient à Ernée  munie des autorisations requises. Elle adopte les Constitutions et les Règles des Religieuses Hospitalières de Laval et s’engage à fonder une communauté. En 1678, elle demande aux Hospitalières de Laval de venir à l’Hôtel-Dieu d’Ernée mais celles-ci refusent.

En 1690, les Chanoinesses de Saint-Augustin de Vire acceptent de desservir l’Hôtel-Dieu d’Ernée ; elles y resteront jusqu’à la Révolution qui les contraint à retourner dans leurs familles.

En 1801, une Sœur revient à l’hôpital avec quelques compagnes. En mars 1819, la communauté vieillissante demande son affiliation aux Religieuses Hospitalières de Laval. Sœur Rojou, supérieure à Laval, exige une fusion complète. Le traité est signé le 24 mai 1819.

En 1963, un nouvel hôpital est construit avenue de Paris. Des Hospitalières de Saint-Joseph y poursuivent leurs activités jusqu’en 1986. En 1975, onze Hospitalières de Laval rejoignent la communauté des sœurs aînées à Ernée, bientôt suivies par des sœurs de La Flèche et de Baugé. A cause de l’âge et de la santé des religieuses, la congrégation doit prendre la décision de fermer la communauté d’Ernée en 2010.

Jusqu’au bout, les sœurs se sont impliquées dans leur environnement tant social que ecclésial.

 

Chapelle de l’Ancien Hotel-Dieu à Ernée