Dieu est simple. C’est nous qui sommes compliqués. Et la sainteté, qui est proposée à chacun de nous, quel que soit notre état de vie, consiste souvent à choisir délibérément la simplicité. La vraie.

Suivre Jésus, imiter Jésus, ressembler à Jésus, voilà trois étapes fondamentales sur le chemin de la sainteté.

Suivre Jésus : c’est la première étape. Et cela vient comme une réponse à un appel.

« Tu m’as appelé, Seigneur, me voici »… La route est encore longue mais le premier pas est fait. La direction est prise. Jésus est déjà là, qui te précède sur la route.

« Me voici » : c’est à la fois une réponse de confiance et un cri d’amour. On ne sait pas où Jésus veut nous emmener. On ne sait pas, tout comme Pierre, ce que sera notre « large » à nous, quels poissons nous prendrons. Mais on avance… non pas dans l’inconnu mais vers celui qui est à la fois inconnu et connu, Jésus, vers celui qui se révèle à ceux qui entrent dans une alliance d’amour avec lui. Suivre Jésus, c’est bien, mais pourquoi faire ? ou plutôt pour quoi être ?…

Si nous suivons Jésus, c’est pour mieux l’imiter. C’est la deuxième étape.

Conformer notre vie à la sienne, en suivant ses conseils… Et nous arrivons ainsi à la grandeur et à la beauté de la profession religieuse qui est tout entière ordonnée au plein accomplissement du baptême.

Faire les trois voeux de chasteté, de pauvreté et d’obéissance, c’est encore choisir d’être plongé dans la mort et la résurrection du Christ.

La chasteté est proposée à tous les chrétiens, mariés ou non, célibataires consacrés ou non. C’est l’art de se recevoir comme un cadeau de Dieu. C’est une manière de vivre avec soi-même, dans une certaine réserve et avec respect, car ce que nous sommes ne nous appartient pas. Cela nous rend plus disponibles aux autres, sans jamais les traiter comme des meubles ou des objets pour notre satisfaction.

Choisie comme un voeu, la chasteté devient une façon de rejoindre plus vite encore le Dieu de l’Alliance. Et c’est la joie d’un célibat consacré à cause du Royaume.

La pauvreté est proposée elle aussi à tous les chrétiens ! C’est une façon de vivre, intimement liée à la chasteté. Car il s’agit bien, toujours, de ne pas se rendre propriétaire  de ce qui nous est donné. Et il y a bien là — vous me le disiez l’autre jour — quelque chose de radical. C’est aussi la grâce d’une vie communautaire. Cela nous pousse au partage et à la simplicité.

Choisie comme un vœu, la pauvreté devient une façon rapide et volontaire d’imiter Jésus.

Saint Paul nous dit en effet : « Lui qui était riche, il s’est fait pauvre pour que nous enrichir de sa pauvreté. » (2 Co 8,9) La pauvreté matérielle à laquelle on consent est un moyen précieux de vivre cette conformation spirituelle au Christ pauvre.

L’obéissance, enfin, est elle aussi proposée à tous les chrétiens. Elle n’est pas vraiment dans l’air du temps. Chacun entend faire ce qu’il veut, comme il veut, quand il veut, pour être libre. Mais libre pour faire quoi ?… Là, on est bien embarrassé et à force de revendiquer l’épanouissement individuel, on finit par se retrouver seul et souvent désespéré, au milieu d’une société indifférente.

Obéir, pour un chrétien, c’est écouter, faire confiance, et faire l’expérience promise à saint Pierre : « Quand tu étais jeune, tu mettais ta ceinture toi-même pour aller là où tu voulais ; quand tu seras vieux, tu étendras les mains et c’est un autre qui te mettra ta ceinture pour t’emmener là où tu ne voudrais pas aller. » (Jn 21,18)

Choisie comme un vœu, l’obéissance prend délibérément sa source dans l’imitation de Jésus-Christ. Elle trouve en toute occasion le moyen de vivre concrètement cette disposition spirituelle du Fils obéissant au Père.

 

Chasteté, pauvreté, obéissance, vécues comme des vœux, introduisent dès ici-bas l’âme religieuse dans la troisième étape de la vie baptismale : la ressemblance au Christ.

C’est la recherche de la charité éternelle révélée dans le Christ, et qui se diffracte ici bas dans les vertus théologales de foi, d’espérance et de charité. Une expression de la prière du rituel de la profession temporaire peut nous éclairer : « Que sa manière de vivre rende gloire à ton nom et serve au salut du monde ». Il y a là une dimension pleinement eucharistique. Si la Vierge Marie, comme le disait Saint Jean-Paul II, est une femme eucharistique, il me semble bien qu’une âme religieuse, qui accepte de suivre Jésus, de l’imiter et de lui ressembler, fait de sa vie une Eucharistie. Et chaque jour dans la célébration des saints mystères, nous répondons : « pour la gloire de Dieu et le salut du monde. »